Perdu dans une surenchère hydraulique, Rachtermick pissait toutes les deux heures. Parfois accaparé dans ses enquêtes adipeuses, vous imaginez sans doutes la problématique. “Tu devrais emmener des couches en permanence” lui conseillait sa mère régulièrement dans une délicatesse digne d’un mangeur de hot-dog géant. “Racht”, comme on le surnommait dans le mi-temps, s’arrangeait pour se trouver près d’un café ou d’une vespasienne propre lorsqu’il partait en mission. Partisan de la “glousseterie” invisible, le tout jeune quinquagénaire stoppait sa marche en pleine rue pour éviter une envolée urinaire insaisissable. Les passants se marraient parfois à la vue du ” tortillage ” corporel qu’il manifestait lorsque l’innommable liquide jaunâtre voulait sortir de sa poche pourtant bien chaude. Mais que voulez-vous, quand il faut…
L’ancien inspecteur regrettait, dans ces moments particuliers, ses 12 ans, époque de contrôle total de sa vessie au point de pisser sur ses potes qui avaient le malheur de se trouver en contre bas du talus sur lequel il lisait les confidences d’Arsène Lupin. ” Ah si seulement” gloussa-t-il en pinçant ses lèvres et en courbant l’échine tout en remontant la rue Beauvoisine, pentue, ardue, dantesque quand vous vous trouvez dans cette situation. Et ne pensez pas que le calvaire se termina lorsqu’il arriva devant sa porte…. Que nenni ! Il fallait prendre la clé fourrée, comme de bien entendu, au fond du sac sous les dossiers massifs de sa nouvelle enquête. Tout cela en continuant à se tortiller le corps rompu à un exercice malheureusement trop récurrent. La porte ouverte, il fallait encore rejoindre les toilettes, se débarrasser du futal pour finir par larguer la “soussoupe” dans le bidet. Quelle aventure ! Et c’était l’instant du soulagement total pour un homme fier d’avoir réalisé un tel prodige. Enfin libéré de sa soupape de sécurité, l’homme vérifia tout de même l’état de son froc ainsi que le carrelage des chiottes afin d’identifier une quelconque fuite. Parfois, ça lui arrivait avant de sortir sa limace mais pas là.Lessivé par tant d’émotions “eructiques”, l’individu s’affaissa, tel l’hippopotame, dans son fauteuil déglingué. L’épisode terminé, la mine reposée, Rachtermick sortit son dossier présentant la nouvelle affaire de son client. ” Des gens disparaissent dans un endroit géographique précis de la ville”.Dernier en date, un certain Logiciel ! “Fachtra,” quel prénom ! largua -t-il sans ambages à tel point que la voisine d’en face sursauta malgré les fenêtres closes. ” Faudra tout de même qu’on me mette du double vitrage, Merde enfin !” , lança t-il immédiatement afin de se faire pardonner de son claironnement atypique.o
– Qu’ est-ce que c’est que cette “brouillouge” d’histoire. Je comprends pourquoi le client ne voulait pas que j’ouvre le dossier dans un espace public, j’aurai pété les plombs ! ” Rachtermick parlait tout seul. C’était un fait avéré et encodé par son psychiatre. D’ailleurs, icelui l’encourageait à étaler ses pensées de sa voix vociférant. Nous y reviendrons, ” don’t worry”. Pour le moment, l’heure était à cette incroyable histoire de disparition.
Que se passait-il dans cet endroit précis de Rouen? Qui organisait les rapts ? Pourquoi à Rouen ? Combien de couches mettait Rachtermick dans une journée ? Pourquoi la vie est-cruelle ? Autant de questions …